Risques sanitaires & récupération des eaux grises pour un usage domestique
- Création : mardi 9 juin 2015 10:26
- Écrit par Laetitia Séchet
L'ANSES à récemment publié, après 4 ans d'études et à la demande de la Direction générale de la santé, un rapport d'expertise sur les risques sanitaires liés à la réutilisation des eaux grises à l'échelle du bâtiment pour des usages domestiques. Alors que cette pratique apparait comme une alternative à l'utilisation d'eau potable et permettrait à innover dans la gestion de l'eau, son déploiement pause encore question...
En raison de risques sanitaires, la réutilisation d'eaux grises (eaux issues des douches, baignoires, lavabos, lave-linge, éviers et lave-vaisselle) pour des usages domestiques n'est pas encore autorisée en France, sauf autorisation particulière du préfet à titre expérimental.
Au regard du rapport d'expertise publié par l'ANSES, la mise en place d'une telle pratique engendrerait plusieurs étapes dans le processus de gestion de l'eau :
- Le traitement des eaux grises avant ré-emploi, celles-ci étant chargées en micro-organismes et contaminants physico-chimiques issus des produits de lavage,
- Le réacheminement des eaux vers le bâtiment (depuis le lieu de traitement),
- La mise en place d'un double réseau de distribution interne au bâtiment, distinct du réseau d'eau potable classique.
Le risque majeur du réemploi des eaux grises concerne le risque de contamination du réseau d'eau potable par le réseau d'eaux grises traitées. A cela s'ajoute quelques risques de contamination des usagers en cas de contact avec des eaux chargées en éléments pathogènes, notamment en immeuble collectif.
L'ANSES formule dans son rapport une série de recommandations de manière à limiter ces risques de contamination :
- Réaliser au préalable sur chaque projet une étude des risques, notamment sanitaires pour les futurs occupants,
- Limiter la réutilisation aux eaux des douches, baignoire, lavabo et lave-linge (celles de la cuisine contenant trop de graisses),
- Informer les élus, porteurs de projet et usagers des possibles impacts sanitaires, environnementaux et économiques liés à la réutilisation des eaux grises,
- Informer les usagers de l'existence d'un système de réutilisation des eaux grises traitées dans le bâtiment et les conseillers sur les pratiques à suivre au quotidien,
- Et enfin, surveiller la qualité sanitaire de l'eau dans le temps.
L'ANSES précise un possible réemploi des eaux grises traitées pour des usages comme l'alimentation de la chasse d'eau des toilettes, l'arrosage des espaces et le lavage des surfaces extérieures. Il est par ailleurs déconseillé d'utiliser ces eaux pour les potagers ou d'y ajouter des produits d'entretien.
Ainsi, malgré les atouts que présente cette démarche (le principal étant l'économie d'eau potable), son déploiement au secteur résidentiel ne semble pas pouvoir se faire en France dans un futur proche. L'ANSES préconise en effet de limiter cette pratique à des cas particuliers, comme dans des secteurs régulièrement affectés par des pénuries d'eau. Dans tous les cas, les établissements aux publics sensibles pour lesquels la réutilisation des eaux pluviales est déjà interdite (nourrissons, personnes âgées, ... cf arrêté du 21 août 2008 relatif à la récupération des eaux de pluie et à leur usage à l'intérieur et à l'extérieur des bâtiments), ne sont pas éligibles à la réutilisation des eaux grises traitées.
A noter enfin que la réutilisation des eaux grises ne pourrait être traitée en boucle, du fait du risque de contaminations cumulées.
Retrouvez le rapport d'expertise de l'ANSES sur les risques sanitaires liés à la réutilisation d'eaux grises pour des usages domestiques.