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Ce 2 janvier 2023, l’Etat rendait publique ses engagements pour la croissance verte. En 2015 déjà, c’était la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui était publiée au Journal Officiel.
On en entend de plus en plus parler, mais qu’est-ce que la croissance verte ? Comment se distingue-t-elle du développement durable ? Une croissance verte permettrait-elle de respecter les engagements de l’Accord de Paris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et ainsi conserver un monde habitable ?
La notion de Développement durable apparait pour la première fois en 1987 par la commission Brundtland (ONU) pour succéder à l’écodéveloppement proposé par Sachs (Sachs, 1980). Il esquisse un modèle avec une économie politique au service d’une équité sociale, dans lequel une réflexion sur « la nature des besoins que viennent satisfaire les richesses créées, la distribution de ces dernières et leur impact sur l’environnement tout au long de leur cycle de vie » est menée (Figuière, 2019). Mais sans doute trop radical pour la pensée de l’époque, l’écodéveloppement ne sera pas repris par les milieux économiques et politiques.
Par la suite, le développement durable a été largement repris depuis son officialisation lors du Sommet de Rio en 1992. Il se présente généralement comme un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations à répondre aux leurs (Brundtland 987). Autrement dit, un développement économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement soutenable.
C’est la relative ambiguïté de la définition qui explique son adoption par un grand nombre d’organismes (entreprise, établissements publics, Etat, etc.). Arbitrer entre les enjeux économiques, sociaux et environnementaux, très souvent contradictoires, n’est pas chose aisée.
Pour mieux comprendre les positions des différents agents sur ce sujet, il convient de se poser la question de la perspective de la durabilité. Boutaud, docteur en science de l’environnement et chercheur au CNRS, résume les perceptions des approches du développement durable :
L’approche technico-économique - durabilité faible - assume qu’il n’y a pas de protection de l’environnement, ni de protection sociale, sans une base économique forte. C’est la vision néoclassique adoptée par une majorité d’acteurs actuellement. De l’autre côté de l’échelle de durabilité, l’approche écosystémique - durabilité forte - insiste sur la non-pérennité du système humain sans prise en compte des capacités du support écologique. Ce sont plutôt les associations écologistes et certaines ONG qui vont revendiquer cette approche. Enfin une approche plus consensuelle cherchant l’équilibre entre ces priorités sera notamment adoptée par certaines administrations ou collectivités publiques.
Ainsi, cette large adoption du développement durable semble relever de perceptions radicalement différentes de celui-ci. Devenu polysémique, ce concept est interprété de très nombreuses manières. Voyons dans quelle approche se situe la croissance verte et quel serait son impact à moyen terme.
L’économie mondiale se mesure à l’aune du PIB, c’est-à-dire à la valeur ajoutée marchande de tous les biens et services créés par tous les agents privés et publics sur un territoire pendant une année donnée. Il y a croissance économique lorsqu’il y a augmentation du volume de ces productions d’une année sur l’autre.
PIB et croissance: les indicateurs rois
La croissance verte est définie par l’OCDE comme « la promotion de la croissance économique et du développement, tout en veillant à ce que les actifs naturels continuent de fournir les ressources et services environnementaux dont dépend notre bien-être ». Volet économique du Développement Durable et largement promue par l’OCDE, elle est maintenant largement adoptée par les puissances mondiales.
La croissance verte cherche à favoriser une croissance économique compétitive, mais en tendant à inclure l’environnement et les problématiques sociétales dans la pratique. Dans la publication « Vers la croissance verte » de l’OCDE, plusieurs leviers sont présentés :
Les outils présentés suivent les mêmes fondements idéologiques que le capitalisme actuellement dominant dans le monde économique. La croissance verte s’inscrit donc dans l’approche de durabilité faible ou technico-économique (pas d’écologie ni de social sans économie). Le postulat est le suivant : la croissance permet de dégager des surplus économiques, qui permettent d’améliorer le niveau de vie, la protection sociale et d’assurer le développement.
En considérant cette hypothèse comme vérifiée dans le passé, les partisans de la croissance verte en déduisent qu’elle doit s’appliquer à l’avenir, en réduisant cependant les aspects néfastes qu’elle a sur l’environnement. Alors que six des neuf limites planétaires ont été franchies (les deux dernières en 2022), le concept de croissance verte est-il le bon à adopter ? Dans quelle direction orienter les modèles d’activités des acteurs économiques pour plus de soutenabilités ? Ces enjeux seront discutés dans notre prochain article sur la croissance verte.
Sachs, I. (1980). Stratégies de l’écodéveloppement. Éditions de l’Atelier (programme ReLIRE). https://doi.org/10.3917/ateli.sachs.1980.01
Figuière, C. (2019). L’écodéveloppement, le développement durable autrement. The Conversation. https://theconversation.com/lecodeveloppement-le-developpement-durable-autrement-114377
https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1644
Boutaud, A. (2005). Le développement durable : penser le changement ou changer le pansement ? : bilan et analyse des outils d’évaluation des politiques publiques locales en matière de développement durable en France : de l’émergence d’un changement dans les modes de faire au défi d’un changement dans les modes de penser. Sciences de l’environnement. Ecole Nationale Supérieure des Mines de Saint-Etienne ; Université Jean Monnet – Saint-Etienne.
45 Etats dont les Etats-Unis, le Japon, le Mexique, le Canada, et la Communauté Européenne signent la Déclaration sur la croissance verte lors de la réunion du Conseil au niveau des Ministres le 25 juin 2009 à l’OCDE. La France l’a inscrite dans sa Loi Transition Energétique pour la Croissance Verte (LTECV).
France gaz a a appelé à relever les objectifs de production de biogaz pour 2030 dans cette LPEC et à viser 20% de gaz renouvelables et bas carbone dans la consommation nationale de gaz en 2030. Au delà des chiffres annoncés, c'est l'occasion de revenir sur cette filière.
La future loi de « programmation quinquennale sur l’énergie et le climat » (LPEC) doit fixer la trajectoire énergétique de la France sur la période 2028-2033, par source d’énergie, avec des niveaux de production prévus en 2033. Cette loi, dont découlent notamment les mises à jour de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) et de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) sera d’après le gouvernement promulguée au mieux en juin 2023.
L’industrie du gaz a appelé à relever les objectifs de production de biogaz pour 2030 dans cette LPEC et à viser 20% de gaz renouvelables et bas carbone dans la consommation nationale de gaz en 2030. Tout ceci est cohérent de l’exercice prospectif conduit par l’Ademe en 2018 qui fait état de la possibilité d’un approvisionnement en gaz 100 % renouvelable en 2050.
Ces gaz renouvelables sont obtenus selon plusieurs voies complémentaires de valorisation des différentes ressources en biomasses, dont les matières biodégradables agricoles.
Vizea, notamment dans les approches territoriales climat/air/énergie, est souvent confronté aux débats entre partisans / opposants à la méthanisation.
Cette annonce de France Gaz est ainsi l'occasion de revenir sur les ordre de grandeurs de la filière, les différentes contre-parties (avérées ou potentielles) et finalement les différents éléments réglementaires autour de cette solution énergétique.
Le biogaz est produit à partir de déchets organiques issus de l’agriculture, des boues de stations d’épuration ou encore des biodéchets des ménages, dont la collecte reste cependant totalement balbutiante en France.
La méthanisation agricole est le processus biologique qui permet de transformer des matières organiques en biogaz. Celui-ci est ensuite brûlé pour produire de la chaleur, de l'eau chaude sanitaire ou de l'électricité. En bref, le schéma idéal se résume en 4 points :
L'ADEME fournit quelques ordres de grandeur qui permettent de prendre conscience des enjeux :
Au 31 décembre 2021 :
Une étude de mai 2022, portée par l'ADEME, analyse financièrement 84 unités de méthanisation agricole dans le cadre de PROdige (programme d'acquisition et de diffusion de références sur la méthanisation agricole). Cette étude, portée par le réseau des Chambres d'Agriculture conclut que :
France Gaz estime que la tendance actuelle se poursuivra, avec une consommation aux alentours de 400 TWh à horizon 2030. Le syndicat entend parallèlement atteindre une production de 25 TWh de biogaz en 2025, et 80 TWh en 2030.
Pour rappel, s’ils y trouvent leurs comptes par ailleurs, les fournisseurs de gaz naturel qui contrôlent plus de 10% du marché national sont contraints, depuis le 29 juin 2020, d’acheter du biogaz à tout producteur qui en fait la demande.
Selon France Gaz ,ce biogaz sera issu
A l’évidence, dans l’image d’Épinal de la méthanisation, le petit agriculteur utilise ses déchets, les méthanise, répartit le digestat comme engrais (limitant ainsi les engrais azotés industriels) sur tout son domaine en veillant à en utiliser juste ce qu’il faut pour ses cultures … et utilise le gaz pour produire localement soit sa propre chaleur soit son électricité… Super !
Sauf que… évidemment, pour massifier, il faut faire de grosses installations et donc il faut de l’argent, beaucoup d’argent. Le mythe du petit agriculteur s’effondre… place aux industriels (pas de jugement de valeur, il en faut aussi) qui risquent du coup privilégient les « intrants » les plus profitables (dans l’ordre les tourteaux de colza, les déchets et pailles de céréales, le maïs et les déchets animaux et en bas du podium, les lisiers et fumiers de porcs et de bovins).
On s'éloignerait alors des vœux de France gaz qui évoquent l’utilisation de CIVE entre deux rotations de cultures principales (qui a aussi l’immense avantage d’éviter de laisser les sols nus limitant ainsi les labours et le lavage des sols) et, le risque est grand, surtout en période de tension, d’une concurrence entre les fonctions agricoles.
Par ailleurs, non seulement les méthaniseurs peuvent avoir des fuites de gaz mais en plus pour garantir qu’une grande masse de digestat ne pollue les sols (et les nappes phréatique), il faut non seulement chauffer plus fort le digestat (plus compliqué pour une petite installation agricole) mais il faut également répartir le digestat sur une multitude d’exploitations agricoles idéalement hors zones d’infiltration très rapide qui conduiraient les polluants du digestat directement dans les nappes phréatiques. Il faudrait également introduire plus d’intrants riches en produits ligneux pour que le digestat ramène de la matière organique des sols mais les végétaux ligneux ne sont pas très rentables en termes de méthanisation … cet article de différents chercheurs de l’INRAE fait le point sur les potentiels « méfaits » de la méthanisation en matière de qualité agronomique.
Enfin, bien qu’un méthaniseur relève du régime des ICPE (installation classée pour la protection de l’environnement), la réglementation a été assouplie en juin 2018. Si le méthaniseur consomme moins de 100 tonnes de matières par jour, un enregistrement auprès de la préfecture suffit. Au-delà, le régime de l’autorisation implique une enquête publique d’un mois pour recueillir l’avis du public mais dans la mesure où un gros méthaniseur de 610 kW consomme 30 tonnes par jour, peu de projets sont concernés par l’enquête publique.
Ce qui nous évite trop de souci en France, notamment du point de vue de la compétition sur les sols, c’est bien que la méthanisation ne soit encore que marginale.
Actuellement, selon une étude de l’ONRB de septembre 2022, seulement 5,5% de la ration annuelle moyenne des méthaniseurs français est constituée de cultures principales et la majeure partie des produits végétaux sont des Cive (13% de la ration moyenne) et des résidus de grandes cultures (2%). Les effluents d’élevages constituent encore 55% de cette ration mais la situation est très contrastée selon les régions.
Toutefois, la question se pose avec le déploiement prévu ou si la méthanisation se développe dans des secteurs où il n'y a pas d'effluents d'élevage, et qui dépendent davantage des cultures méthanogènes. Il pourrait alors s’organiser une concurrence des terres puisque la plupart du temps, ce qui fait le meilleur méthane est aussi comestible (tourteaux de colza, maïs…) ou exploitable (paille pour le bâti). En 2014, près de 7 % de la surface agricole allemande était dédiée aux 10 000 méthaniseurs du pays. Comme il s’agit en général d’une culture très émettrice de carbone (maïs par exemple), le gain envisagé peut devenir négligeable voire négatif si ces plantations remplacent des prairies agricoles ou pire des forêts voire, comme cela é été constaté en Allemagne des tourbières.
Notons en premier lieu au niveau économique que, pour les unités qui valorisent l’énergie par injection dans les réseaux de gaz : le tarif d’achat de l’énergie baisse de plus de 20 % si les résidus végétaux ne sont pas des inter-cultures de couverts mais des cultures énergétiques dédiées.
Par ailleurs, le décret n° 2016-929 du 7 juillet 2016 avait introduit un seuil de «15% maximum de cultures alimentaires ou énergétiques» dans la ration utilisée par les méthaniseurs. L’idée était de précisément éviter que les cultures normalement alimentaires ne soient utilisées (à plus de 15%) pour nourrir les méthaniseurs.
Certaines dérives sont constatées par certains chercheurs de l'INRAE : « de nombreuses cultures sont déclarées comme Cive alors qu'il s'agit de cultures principales à vocation énergétique et non pas de cultures intermédiaires. Une des rotations préférées en méthanisation (Cive d’hiver) est la suivante : céréales d'hiver semées à l'automne, récoltées avant maturité en mai pour alimenter les méthaniseurs, suivies de maïs récolté en septembre par ensilage pour alimenter les méthaniseurs, suivi de céréales …»
Pour anticiper la montée en force de la méthanisation, et répondre à ces dérives, le Décret n° 2022-1120 du 4 août 2022 précise qu’une culture est dite principale si elle répond à au moins un des critères suivants :
Le décret complète également la notion de « culture intermédiaire » en ajoutant un critère spatial (« des cultures cultivées sur l'Union européenne ») et un critère temporel (des « cultures qui sont semées et récoltées entre deux cultures principales récoltées sur une année civile ou deux années civile consécutives »).
Ce nouveau texte clôt-il le débat sur la distinction entre cultures principale et cultures intermédiaires, entre cultures vivrières et cultures à vocation énergétique… ?
L’histoire ne le dit pas encore mais pour permettre une mutualisation de la vérification avec le contrôle du critère de durabilité de la biomasse introduit par les articles 29 et 30 de la directive RED2, le respect de la limite de 15% de cultures alimentaires pour chaque lot de biométhane injecté est calculé sur une période de production inférieure à un an.
Cette directive CE 2018/2001, dite RED 2 (pour Renewable Energy Directive II) définit l'objectif de développement des énergies renouvelables en Europe et les règles du jeu pour l'atteindre. Initialement centrée sur l'encadrement de la production des biocarburants, sa deuxième version, publiée en 2018, a étendu le champ de ses exigences à la production de chaleur, de froid, d'électricité à partir de la biomasse et donc à la méthanisation. Pour contribuer aux objectifs de développement d'énergies renouvelables, les sites de production les plus importants ( > 19.5 Gwh par an) vont devoir rendre des comptes :
La certification de la durabilité de la production devient une obligation pour les méthaniseurs qui veulent commercialiser le produit en Europe et bénéficier du tarif d’achat en France à partir du 1er juillet 2023.
Les lots produits sur des sites mis en service entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2025 doivent présenter un potentiel de réduction des GES d'au moins 70% par rapport aux émissions résultant de l'utilisation d'un combustible fossile de référence ; cette exigence passera à 80% pour les sites mis en service à compter du 1er janvier 2026.
L’annonce du potentiel industriel de 20% de biogaz conforte la faisabilité technico-économique du 10% prévu actuellement par la PPE. Il conforte nos prospectives ou potentiels territoriaux comme gage de crédibilité : le taux de 10% de biogaz est largement accessible pour 2030 !
Ce taux est d’autant plus accessible que la consommation de gaz globale baisse !C’est même sûr qu'en divisant par 4 la consommation de gaz actuelle alors le taux de biogaz peut atteindre les 20 voire les 30%.
D’ailleurs, Solagro (responsable du scénario Afterre 2050 en lien avec Negawatt) continue de pousser le développement de la filière, tout en prenant en compte les dérives évoquées mais avec parfois des hypothèse un peu optimistes ou du moins ne prenant pas en compte les augmentations récentes du prix du gaz.
Nous préconisons ainsi, hors spécificités territoriales, de :
Comme l'évoque Salagro, tout projet de méthanisation doit s’adosser à un projet agricole, jamais le contraire.
A lire en complément : ce rapport du sénat fait un point bien plus exhaustif sur la filière
Afin d’aider les entreprises à être toujours plus ambitieuses, la réglementation carbone évolue en 2022 selon 3 points principaux détaillés dans le présent article.
Par le passé plusieurs Bilan d'Emissions de Gaz à Effet de Serre (BEGES) devaient être réalisés pour un même groupe si les SIREN étaient différents, ce qui ne facilitait pas, économiquement et en termes d'organisation, le lancement des BEGES.
A partir de 2023, le périmètre organisationnel des BEGES est modifié : L’ensemble des établissements sera pris en compte pour un même BEGES même si les SIREN sont différents.
Une entreprise peut ainsi déclarer les résultats consolidés à l’échelle de l’ensemble de ses établissements et filiales pour une stratégie commune.
Source : ADEME
Les émissions de gaz à effet de serre d’une organisation peuvent être :
Pour suivre plus finement ces émissions, les BEGES sont segmentées en trois catégories (dites "scopes") :
Avant 2023 le scope 3 n’était pas obligatoire.
Le décret 2022 modifie le périmètre opérationnel de manière à comptabiliser les émissions de GES selon un périmètre élargi (scope 1, 2 et 3).
Par exemple, en 2023, si une entreprise a une partie de ses émissions générées par ses achats ou la logistique, elle aura l’obligation de calculer ces émissions ce qui n’était pas le cas avant la révision du décret.
La nouvelle méthode bilan carbone redéfinit également le périmètre selon 6 catégories, qui couvrent les anciens scopes 1, 2 et 3. La réorganisation des catégories d’émissions proposée est la suivante :
Source : ADEME
Il devient obligatoire de déclarer les 6 catégories en intégrant les émissions significatives. Leur significativité est évaluée par les critères suivants :
Pour rappel, l’obligation de dépôt concerne les structures suivantes :
La LEC prévoit un renforcement du plan d’action en plan de transition, plus précis sur les moyens et actions. Il devient ainsi obligatoire de proposer un plan d'actions :
Enfin, la réglementation inclut une augmentation du plafond de sanction de 1 500 € à 10 000 € voire 20 000 € en cas de récidive.
Pour plus d'informations :
Longtemps perçue comme une démarche facultative lors du développement d’un produit ou d’un service, l’éco-conception doit désormais s’inscrire dans le cœur des méthodes de travail des entreprises. Source d’innovation, de résilience et de gain en compétitivité, l’éco-conception a tout pour plaire. Qu’est-ce que l’éco-conception ? Quelle démarche suivre ? Quelles subventions ? Réponses à toutes ces questions ci-dessous.
Une démarche d’écoconception vise à prendre en compte l’environnement dans la conception et le développement de produits et de services. Cela revient à concevoir en toute connaissance des impacts environnementaux, en adoptant une démarche de compromis entre les contraintes techniques, règlementaires, commerciales et environnementales. L’éco-conception a pour objectif la réduction des impacts environnementaux tout au long du cycle de vie du produit, à service rendu au moins équivalent.
La démarche d’écoconception est une analyse croisée selon deux axes :
Approche cycle de vie (ACV): ce sont toutes les étapes de la vie du produit qui sont prises en compte (extraction des matières premières, fabrication, transport, distribution, utilisation, fin de vie et valorisation)
Représentation graphique des phases du cycle de vie – Source : Vizea
Exemples d’impacts environnementaux considérés – Source : Vizea
La norme ISO 14 062 – Management environnemental présente l’intégration des aspects environnementaux dans la conception et le développement de produit. Les démarches d’éco-conception pour objectif d’être complétement intégrés par les équipes de développement. Néanmoins il est conseillé de s’accompagner d’experts en développement durable lors de la réalisation des premières démarches.
Le processus d’éco-conception se décline généralement en 6 étapes principales :
Selon les besoins et les ambitions de la démarche, différents niveaux de maturité sont accessibles. De l’amélioration progressive de produits existants (A) au concept à fonctionnalités identiques mais largement modifié (B). L’étape finale peut consister à la définition d’un nouveau concept (C), comme le passage d’une logique produit à service par exemple (étape initial menant à l’évolution du modèle d’activité de l’entreprise).
L’éco-conception permet donc la recherche d’un compromis entre performance, faisabilité, impacts environnementaux et coûts. Néanmoins les aspects sociaux et sociétaux ne sont pas pris en compte dans les démarches d’éco-conception classiques. Dans le cadre d’une démarche de développement durable ou d’une stratégie RSE, il est possible d’évaluer l’empreinte socio-économique d’un produit ou d’un service.
L’ACV sociale permet d’identifier les impacts sociaux et sociaux-économiques générés ou attendus à chaque étape du cycle de vie. Tout comme l’approche cycle de vie, ce bilan est effectué en considérant 5 types de parties prenantes et 6 catégories d’impacts :
- Communautés locales - Salariés - Fournisseurs et partenaires - Consommateurs - Grand public
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- Santé et Sécurité - Gouvernance - Conditions de travail - Droits humains - Répercussions socio-économiques - Héritage culturel |
L’intégration de l’ACV sociale dans une démarche d’éco-conception permet d’évaluer les risques et bénéfices socio-économiques associés au nouveau concept, d’accompagner la conception de produits responsables et de communiquer auprès des parties prenantes.
Dans le cadre du Plan de relance, l’ADEME bénéficie d’une enveloppe de 35 millions d’euros sur les deux prochaines années pour faciliter les mises en transition. Quelque soit la maturité de la démarche d’éco-conception, des subventions et aides à l’investissement sont accessibles aux TPE et PME :
En complément, le Fonds Economie Circulaire peut aussi être utilisé par les acteurs économiques. Au total, les aides proposées par l’ADEME sont multipliées par quatre par rapport aux années précédentes.
L’ADEME propose de nombreuses aides à l’éco-conception, notamment via le Plan de Relance
Dans le cadre d’une démarche d’amélioration continue et pour s’engager pleinement dans le nécessaire développement durable, une entreprise doit identifier les enjeux environnementaux de ses produits et services pour cibler les leviers d’actions. Outre les gains environnementaux, l’écoconception est un levier de création de valeur permettant d’améliorer le produit ou service, grâce un facteur différenciant et permet de fédérer les équipes autour d’un projet porteur de sens.
ADEME :
Pôle éco-conception :
L’espace public, nous le pratiquons chacun quotidiennement. Support de nos déplacements, lieu d’échanges, d’accès à la nature ou encore d’attente ou de halte, il constitue la trame de fond de nombreux moments de notre vie.
S’il est un espace où nous retrouvons aussi bien nos proches qu’un espace où nous pouvons nous ressourcer et nous aérer l’esprit, il est aussi un espace de passage qui peut parfois être anxiogène, propice au sentiment d’insécurité ou sembler inadapté à nos besoins ou la nature de nos déplacements.
Ainsi, la conception des espaces publics nécessite de considérer l’ensemble des usagers (enfants, personnes âgées, adolescents, adultes, familles, personnes en situation de handicap…) pour identifier leurs besoins variés, anticiper les contraintes auxquelles ils peuvent faire face au quotidien, intégrer leur sensibilité et leur perception, favoriser l’appropriation égalitaire de ces espaces destinés à l’usage de toutes et tous.
Cette infographie questionne les mécanismes de réflexion et enjeux d’appropriation de l’espace public et propose des leviers d’actions pour les concevoir de manière adaptée pour toutes et tous. Outre les leviers d’aménagement qui sont principalement présentés ci-dessous il est nécessaire de souligner l’importance de la concertation qui constitue un des meilleurs moyens pour concevoir des espaces publics répondant aux attentes des différents usagers.
Notre contexte économique, environnemental et sociétal démontre aujourd’hui une nécessaire course à l’innovation selon un modèle plus soutenable pour les entreprises. Cependant l’innovation peut sembler inaccessible à certaines d’entre elles. Il convient ainsi, une fois l’innovation soutenable définie (cf. article Innover en faveur d’un développement soutenable : Qu’est-ce que l’innovation soutenable ?) de s’intéresser aux différentes manières d’innover pour les entreprises.
Notre précédent article proposait une définition de ce que peut être un business model soutenable. L’innovation soutenable du modèle économique d’une entreprise s’évalue ainsi d’après notre approche selon l’intégration et l’articulation de quatre dimensions : l’attractivité, la rentabilité, la performance environnementale et la création d’emplois, partenariats.
Mais ces différentes dimensions peuvent être intégrées de manière plus ou moins radicales, sous une forme de gradation, de transition de l’innovation soutenable.
Cette progression fait l’objet de notre approche pas à pas de la Transition Environnementale des Entreprises.
Il est important de considérer que toutes les entreprises ne sont pas égales face à la possibilité d’innover que ce soit d’un point de vue économique ou de la capacité à prendre un risque élevé. Nous concevons l’innovation soutenable comme une transition à adopter en fonction de ses moyens initiaux et de s’appuyer sur cette base pour définir une trajectoire permettant de revoir continuellement ses ambitions à la hausse. Cette trajectoire s’inscrit ainsi dans une démarche pas à pas de l’innovation de business model.
Le premier niveau de l’innovation soutenable consiste à reconsidérer le produit ou le service vendu par l’entreprise et chercher à le rendre plus « responsable ». Reprenons l’exemple fil conducteur de notre article sur l’innovation soutenable : une entreprise de production de jeans. Le premier pas pour cette entreprise consistera à travailler sur l’éco-conception (conception plus environnementale) de ses pantalons. En utilisant des matériaux moins impactant pour l’environnement, plus durables, en redéfinissant les process pour qu’ils consomment moins de flux (eau, énergie, intrants), etc.
Le jean produit sera alors plus attractif de par son estampillage « moins impactant pour l’environnement ». L’entreprise devra bien évidemment s’assurer de sa rentabilité financière, mais s’affranchira d’une vulnérabilité de court terme relative à l’évolution des normes de plus en plus contraignantes par exemple. D’un point de vue environnemental, l’impact est mesurable sur le produit lui-même par une utilisation plus sobre des ressources et le choix de matériaux plus durables. Enfin, ce modèle impliquera l’intégration de nouvelles compétences internes en développement soutenable.
2. Un deuxième pas : l’innovation incrémentale d'une organisation, d'un réseau de valeur
Pour aller plus loin sur notre exemple, le deuxième pas permettra à l’entreprise de prendre du recul et d’élargir son périmètre d’actions à l’ensemble de son réseau de valeur en analysant l’ensemble des étapes du cycle de vie du produit mais également l’impact de l’ensemble des parties prenantes autour du réseau de valeur existant. Notre producteur de jeans se posera ainsi la question de la soutenabilité de sa production à l’étranger, pour la rapatrier localement et sur le choix de ses partenaires, par exemple les transporteurs en définissant des clauses de soutenabilité dans son cahier des charges : derniers kilomètres en vélo cargo, utilisation de véhicules roulant au biogaz, etc. L’attractivité de son produit est ainsi encore plus élevée vis-à-vis de son impact environnemental et sociétal. Concernant la rentabilité, le produit sera éventuellement vendu plus cher mais présentera une plus grande attractivité et s’affranchira de certaines vulnérabilités (dépendance à des marchés externes, taxe carbone, etc.). L’impact environnemental est ici mesurable sur l’ensemble du réseau de valeur et plus uniquement sur le produit lui-même. Enfin en termes d’emplois et partenariats, l’entreprise créé de l’emploi local qualifié et s’entoure de partenaires partageant ses valeurs.
3. Un troisième pas ou regard vers l'avenir: l'innovation de rupture
Pour répondre aux critères présentés dans la première partie de cet article, l’innovation de rupture est l’innovation la plus poussive. Elle implique un degré de rupture profond vis-à-vis de l’existant, aussi bien dans les modes de production que dans les modes de consommation. Elle vise même à s’en extraire pour repartir de l’objectif de soutenabilité. Ces ruptures engagent des modifications dans les usages pour le consommateur et des modifications dans les modalités de développement, de production et de valorisation de ces nouvelles offres pour les entreprises. Ensuite, et de manière complémentaire, ces innovations soutenables de rupture disposent d’une dimension systémique. Dès lors qu’elles opèrent des ruptures radicales, elles engagent un changement dans les interdépendances qui peuvent s’établir entre les différentes parties prenantes et dimensions d’un système. Ces innovations, ne peuvent être développées de manière isolée, sans remettre en question les équilibres et modes d’interaction préexistants sur l’ensemble du réseau de valeur impliquant plusieurs entreprises. Appréhender l’innovation soutenable dans sa manière la plus complète implique donc de saisir un processus complexe de changement, articulant des ruptures aux niveaux organisationnel, inter-organisationnel et sociétal.
Pour notre producteur, il s’agira peut-être de ne plus vendre des jeans, mais de développer une offre de leasing de jean, s‘engageant ainsi dans un nouveau modèle d’économie de fonctionnalité et d’économie circulaire ou même pourquoi pas de changer de produit initial, le jean étant un produits textiles à fort impact environnemental. En repensant son activité via son objectif de soutenabilité, l’entreprise repousse ses limites et construit un tout nouveau modèle économique. La rentabilité sera assurée par une location en lieu et place d’une vente et l’entreprise réduira sa vulnérabilité liée à la raréfaction des matières premières puisqu’elle produit moins. L’attractivité tiendra dans cette offre de soutenabilité de rupture dans laquelle le consommateur sort du schéma de possession pour adopter l’accès à des produits textiles de qualité, produits localement et à l’impact environnemental réduit. La performance environnementale se situe à tous les niveaux : produit, réseau de valeur, intégrant les consommateurs et création d’une circularité du produit. Enfin, ce modèle nécessite de nouveaux emplois dédiés aux spécificités de ce nouveau modèle de production et de rémunération ainsi que de nouveaux partenariats.
L’innovation soutenable pas à pas
L’émergence de l’innovation soutenable et de ces nouveaux business models résulte d’un processus de construction collective, de négociation entre des points de vue hétérogènes à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise. De ces interactions émergent des logiques d’enrôlement et de détermination progressive de l’innovation. Le business model agit à la fois comme outil de transition mais également d’explicitation de ce que peut être une innovation soutenable. Ainsi, il est nécessaire de circonscrire les possibles d’une innovation soutenable. Cet article propose un panel de solutions permettant d’innover de manière soutenable en fonction de la maturité de l’entreprise et de sa capacité/volonté à prendre des risques. Ces typologies d’innovation permettent d’offrir une trajectoire progressive accessible et offrant un panachage qui s’adapte à chaque situation. Pour ces différents pas, il existe aujourd’hui de nombreux financements pouvant inciter les entreprises à enclencher leur transition de modèle économique (cf. Mission Transition Ecologique et les aides.fr). Alors n’attendez plus et engagez-vous !
L’eau douce ne représente que 2,5% de l’eau sur Terre. La diminution des ressources de cet « Or Bleu » étant avérée avec le changement climatique, il est primordial de l’économiser. Réduction des prélèvements, rationalisation des consommations, exploitation d’autres potentiels… quels sont les leviers au sein des bâtiments permettant de telles économies ?
D’après l’Observatoire SISPCA, aujourd’hui, la consommation d’eau moyenne d’un Français correspond à 148 litres par jour, soit 54 m3 d’eau potable consommés chaque année. Le 1er usage consommateur d’eau potable d’un foyer est les douches et bains, suivi des sanitaires. Sur 148 L d’eau potable par jour, seul 1% est réellement bu.
Concernant les sanitaires, ce sont 10 800 L d’eau potable qui sont utilisés pour les chasses d’eau d’une personne par an en France.
En sachant que la quantité d’eau utilisée pour 1 chasse d’eau représente l’équivalent des besoins de boisson en eau d’une personne pour 2 à 4 jours (à hauteur d’un besoin de 1,5 L d’eau / jour), il est primordial d’utiliser cette ressource vitale à bon escient.
Exploiter le potentiel d’autres ressources (eaux pluviales, eaux grises) pour des usages ne nécessitant pas une qualité « potable », autrement dit exploiter une eau « ménagère », permettrait ainsi d’économiser l’eau potable au sein des bâtiments mais également une économie financière sur les charges des ménages.
En France, l’eau de pluie peut être récupérée pour un usage domestique, hors consommation alimentaire, dans les cas suivants :
Deux systèmes sont utilisés pour récupérer et stocker les eaux pluviales dans un but d’une réutilisation en intérieur : la cuve enterrée (plastique ou béton) et la citerne souple.
Les bacs de récupération en extérieur ne sont pas conseillés pour un usage de l’eau en intérieur car l’eau doit être à l'abri de l'air et de la lumière pour éviter d'être altérée par le développement de microbes ou bactéries et permettre le stockage d'une eau propre et claire.
Citerne souple © Sageau
Cuve enterrée © GRAF
Certains points sont à intégrer dès la conception du bâtiment afin d’installer et d’utiliser correctement ce type de système :
Dans les projets urbains type ZAC (Zone d’Aménagement Concerté), des leviers contractuels peuvent être mobilisés pour intégrer ces systèmes via les documents cadres : CPAUPE (Cahier de Prescriptions Architecturales Urbaines Paysagères et Environnementales), CCCT (Cahier des Charges de Cession des Terrains), PSV (Promesses Synallagmatiques de Vente) … afin de s’assurer du respect de la prescription dans la suite du projet.
De plus, certaines certifications encouragent la récupération et la réutilisation des eaux pluviales dans la construction et la rénovation de logements, telles que NF Habitat HQE, HQE Bâtiment Durable, BREEAM, la démarche BDF (Bâtiment Durable Francilien) …
Extrait de la certification NF Habitat HQE
Extrait du référentiel BDF
La récupération de l’eau de pluie est soumise à la réglementation suivante :
Les eaux grises sont les eaux usées ne renfermant pas de matières fécales : eaux domestiques provenant des éviers, lavabos, douches, bains, lave-vaisselle, lave-linge.
Selon l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail (ANSES), sous réserve de la mise en œuvre d’un traitement et de mesures de gestion du risque appropriées, les eaux grises traitées peuvent être adaptées aux usages en milieu domestique suivants :
Cette récupération favorise ainsi un circuit plus fermé de l’eau au sein du bâtiment, permettant de réduire la quantité d’eau (potable) nécessaire et de diminuer le flux évacué vers les infrastructures d’assainissement et d’épuration.
Un récupérateur d’eaux grises est un dispositif permettant de récupérer les eaux grises issues des douches et des bains, de les nettoyer, les filtrer et les recycler afin de les réutiliser pour d’autres usages en intérieur.
Le schéma ci-dessous présente un circuit récupérant les eaux issues des lavabos, des douches et lave-linges pour alimenter les chasses d’eau des sanitaires et le jardin en toiture.
De la même manière que pour la valorisation des eaux pluviales, des certifications accompagnent la valorisation des eaux grises au sein des logements telles que NF Habitat HQE, BREEAM, le référentiel BDF…
Extrait de la certification NF Habitat HQE
Afin d’économiser l’eau de manière générale dans un bâtiment, des systèmes hydro-économes performants sont nécessaires pour les équipements de plomberie, comme notamment :
Au-delà de tout système technique à installer dans les bâtiments, une sensibilisation auprès des nouveaux habitants et gestionnaires reste indispensable (organiser des ateliers de sensibilisation aux gestes éco-responsables, accompagner les ménages en leur permettant de suivre leurs consommations, …), mais plus généralement auprès de l’ensemble des citoyens !
L’eau est une ressource indispensable à la vie, économisons-la !
Chez Vizea, les sanitaires des locaux de Malakoff sont alimentés en eaux pluviales grâce à la récupération des eaux de pluie de la toiture. Une cuve enterrée de 6 m3 est installée sous la terrasse, et en cas de cuve vide en période sèche, l’adduction rebascule sur le réseau en eau potable.
Depuis son installation en juin 2018, ce sont plus de 223 m3 d’eau potable qui ont été économisés !
Cuve de 6m3 enterrée sous la terrasse des locaux de Vizea à Malakoff
Sources:
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F31481
Notre contexte économique, environnemental et sociétal démontre aujourd’hui une nécessaire course à l’innovation selon un modèle plus soutenable pour les entreprises. Cependant l’innovation peut sembler inaccessible à certaines d’entre elles. Il convient ainsi dans un premier temps de définir ce qu’est l’innovation soutenable. Pour définir les composantes de l’innovation soutenable, nous nous appuierons sur exemple servant de fil conducteur : un producteur de Jeans. Dans un prochain article, nous détaillerons ensuite les différentes manières d’innover pour les entreprises.
Qu’entend-on par innovation soutenable ? Pourquoi ne pas parler d’innovation durable ? La notion de durabilité réfère à une vision purement temporelle sans corrélation avec la viabilité. Bien qu’il s’agisse uniquement de sémantique, parler de développement durable ou d’innovation durable est réducteur, puisqu’il revient à faire l’impasse sur la notion essentielle de viabilité, de pérennité de ce développement ou de cette innovation. C’est pourquoi nous préférons ici la notion de soutenabilité.
Même si la notion de soutenabilité est aujourd’hui un élément de langage courant et le symbole de l’action dans notre contexte d’urgence climatique, il convient néanmoins de redéfinir ce qu’elle cache. La soutenabilité c’est l’engagement du respect de trois dimensions fondatrices que sont l’économie, l’environnement et la société de manière égale sans compromis sur l’une de ces dimensions (d’après la définition de Brundtland : Sustainable Development, 1987). Une innovation soutenable doit ainsi respecter ces engagements. Se pose alors la question de la manière de permettre aux entreprises d’analyser leur modèle économique au regard de cet enjeu de soutenabilité. Notre approche se décompose en quatre dimensions de soutenabilité à analyser (d’après Bisiaux 2015). La présentation de ces dimensions fait l’objet des paragraphes suivants.
Cette dimension associe les piliers économique et social du développement soutenable. Il s’agit de considérer l’intérêt de l’utilisateur vis-à-vis des offres associées aux différents business models. L’attractivité regroupe deux éléments d’analyse.
D’un point de vue économique, l’attractivité est la disposition des utilisateurs à payer pour une offre donnée. D’un point de vue social, l’attractivité analyse l’offre par rapport à l’évolution du rapport à la consommation.
Les nouveaux modes de consommation montrent une tendance en faveur d’une valorisation de la fonctionnalité, de l’usage plutôt que de la propriété de biens. Nous faisons ainsi le postulat que dans le cadre de l’innovation soutenable, l’attractivité de ces nouvelles offres fonctionnelles repose sur leur capacité à proposer des offres fonctionnelles et/ou évolutives selon les situations d’usage des utilisateurs. Nous postulons que ces offres fonctionnelles sont plus attractives que les offres matérielles, l’innovation soutenable s’adressant à cette tendance émergente de besoins de fonctionnalité.
Prenons comme exemple, un producteur de jeans. Il s’agira d’évaluer la capacité à payer des consommateurs pour le produit jeans lui-même en fonction de ses caractéristiques intrinsèques. En termes de soutenabilité, l’entreprise peut afficher des valeurs environnementales en lien avec la conception par exemple, ou encore des valeurs éthiques avec le lieu de production, etc. Mais le niveau d’attractivité sera le plus élevé si ce producteur s’attache à vendre non plus son bien mais l’usage de ce bien via un modèle d’économie de fonctionnalité. Par exemple un abonnement mensuel donnant accès à différents vêtements et plus uniquement un jeans, pour avoir accès aux dernières tendances (offre d’usage et évolutive).
Cette dimension d’ordre économique concerne principalement le fonctionnement de l’entreprise. L’objectif est d’évaluer si le modèle économique permet la réalisation de bénéfices économiques pour l’entreprise. A cela s’ajoute une dimension temporelle à la rentabilité dans le cadre de l’innovation soutenable. Il s’agit de ne plus uniquement d’analyser la rentabilité du business model mais sa pérennité et sa vulnérabilité en évaluant notamment la durabilité du système mis en œuvre sur le long terme. Cette durabilité du système peut être caractérisée, par exemple, par la nature des relations entre l’entreprise et ses clients, à savoir si les relations sont pérennes sur le long terme ou si elles sont davantage ponctuelles. Elle peut également être caractérisée par sa vulnérabilité aux différents éléments contextuels : évolutions des pratiques de consommations, évolution de la réglementation, dépendance aux énergies fossiles, crises sanitaires, etc.
Pour le producteur de jeans, il conviendra d’analyser si son nouveau modèle économique de fonctionnalité lui assure une pérennité sur le long terme et s’il lui permet d’anticiper des vulnérabilités telles que la raréfaction des matières premières, une éventuellement évolution réglementaire sur la restriction des consommations d’eau dans l’industrie, etc.
La performance environnementale d’un business model permet d’évaluer la réduction ou l’augmentation de l’impact environnemental des différents éléments le composant suite à leur mise en œuvre et pour un périmètre fonctionnel donné. L’amélioration de la performance environnementale des business models implique par exemple des démarches de rationalisation des matières premières et consommation d’énergie, la mutualisation de biens matériels, les démarches d’éco-conception, etc.
Pour le producteur de jeans, l’évaluation de son impact environnemental passera par exemple sur une analyse de cycle de vie de son produit et ou de son process, dans lequel seront mesurées les consommations de matières premières, d’eau, d’énergie le tout analysé au regard de l’impact sur de nombreux aspects : la qualité de l’air, la qualité de l’eau, de la santé, l’épuisement des ressources, etc.
Cette dernière dimension d’ordre social consiste principalement à analyser le potentiel de relocalisation et/ou de créations d’emplois d’un business model. Elle permet également de caractériser la capacité à créer des partenariats. Il s’agit d’évaluer la territorialisation de l’activité productive.
Pour le producteur de jeans, il s’agira d’analyser le type de parties prenantes qui l’entourent, de leur engagement dans les enjeux de soutenabilité et d’étoffer ces réseaux en créant de l’emploi qualifié concernant les enjeux environnementaux par exemple.
Déterminants de l’innovation soutenable
L’innovation soutenable du modèle économique d’une entreprise s’évalue ainsi selon l’intégration et l’articulation de ces quatre dimensions. Mais ces différentes dimensions peuvent être intégrées de manière plus ou moins radicales, sous une forme de gradation, de transition de l’innovation soutenable. Aussi, dans notre prochain article nous vous proposons de vous décrire trois niveaux d’innovation soutenable, trois niveaux d’intégration de ces enjeux pouvant offrir aux entreprises un panel d’innovation soutenable adapté à leur situation tout en envisageant une amélioration continue en cherchant progressivement à atteindre l’innovation soutenable la plus radicale.
- Brundtland : Sustainable Development, 1987
- Bisiaux : La transition vers l'innovation soutenable pour les entreprises industrielles : une approche par les business models
- http://theses.fr/2015COMP2216
Souvent réduite à un objectif de résultat fixé par un simple « clic » dans les études thermiques, l’étanchéité à l’air est un sujet à part entière qui mérite d’être mis en lumière afin d’y voir plus clair …
Il faut tout d’abord distinguer les deux types d’étanchéité à l’air qui sont décrites dans les projets de construction / rénovation :
Si la bonne mise en œuvre de la seconde relève essentiellement du travail de l’entreprise CVC, la première elle, est un véritable révélateur de la qualité de maîtrise des sujets inter-lots sur les chantiers. Revenons en arrière afin de contextualiser ces deux types d’étanchéité.
Introduite par le label BBC Effinergie en 2007, l’étanchéité à l’air de l’enveloppe consiste à caractériser la perméabilité à l’air de l’enveloppe thermique du bâtiment (planchers, façades, menuiseries extérieures …). Elle est liée à des thématiques diverses, et entre autres à :
Pour vulgariser, elle s’exprime sous l’indicateur Q4 en m3/(h.m²). C’est-à-dire que dans l’hypothèse d’une dépression de 4 Pascal entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment c’est le débit d’air extrait à travers les « fuites » de l’enveloppe, par mètre carré de surface déperditive (ie. Façade, toiture, menuiseries extérieures …).
En RT2012, un certain nombre d’objectifs sont fixés par typologie de bâtiment (voir tableau ci-dessous), à noter que :
La première fois que l’on rencontre l’étanchéité de l’enveloppe sur un projet est donc en phase APS/APD à réalisation de la première étude thermique exhaustive. Il est alors simple de contraindre la valeur via un onglet dans les études, d’autant plus qu’elle permet de réaliser des gains significatifs sur les indicateurs bioclimatiques du projet, et donc forcément sur la consommation d’énergie également.
Cependant, il ne faut pas oublier que si cette valeur est fortement contrainte, elle sera mesurée et vérifiée en fin de chantier. Il devient alors nécessaire de transcrire les mesures et précautions à prendre pour la bonne mise en œuvre inter-lots, notamment dans les CCTPs voire dans les plans d’étanchéité à l’air, et de prévoir des prestations en adéquation avec les objectifs visés (sensibilisation des compagnons, mesures intermédiaires …).
On parle de révélateur inter-lots sur les chantiers pour l’étanchéité à l’air de l’enveloppe. En effet, le résultat ne dépend pas que d’un seul lot (même si chaque lot doit assurer la bonne mise en œuvre de ses éléments) mais bien des jonctions et de la bonne synthèse entre lots. Pour n’en citer que quelques-uns :
A ce titre, le CEREMA a publié des carnets de détails pour la maîtrise de l’étanchéité à l’air de l’enveloppe, avec plus de 200 cas traités¹
Finalement, l’étanchéité à l’air de l’enveloppe, c’est aussi un indicateur de la qualité globale du bâtiment et de la bonne réalisation des travaux lots par lots et aussi de leur effort de synthèse.
Introduite par les labels Effinergie+ et BEPOS-Effinergie 2013, l’étanchéité à l’air des réseaux consiste à caractériser la perméabilité à l’air des réseaux de ventilation (des gaines donc). Elle est liée à des thématiques diverses, et entre autres à :
Pour vulgariser, il existe 5 classes d’étanchéité à l’air des réseaux : par défaut, A, B, C et D. Il faut toutefois préciser que la classe « par défaut » est la moins performante et la classe D la plus contraignante, soit un classement à l’inverse de tout ce que l’on connaît dans le bâtiment …
Si les classes « par défaut » et A sont atteignables avec une attention classique dans les bâtiments d’habitation, la classe B relève plutôt d’installations spécifiques en tertiaire et la classe C de locaux type salle blanche. La classe D quant à elle n’est pas disponible dans les logiciels d’études thermiques.
A noter qu’en RT2012 il n’y a pas d’obligation à réaliser systématiquement la mesure. Elle est seulement demandée si le projet se favorise, encore une fois dans l’étude thermique, avec une classe autre que « par défaut ». Comme pour l’étanchéité à l’air de l’enveloppe, un gain est constaté quand on passe à une étanchéité plus contraignante, mais cette fois seulement sur les indicateurs de consommation énergétique du projet.
Afin d’assurer l’atteinte de l’objectif pour l’étanchéité à l’air des réseaux, il s’agit surtout de sensibiliser l’entreprise CVC à l’objectif visé, aux bonnes pratiques et à la qualité de sa mise en œuvre.
Rappelons tout de même que le sujet est relativement complexifié par le marquage des objectifs d’étanchéité et des accessoires à joints, pour en faire une synthèse :
A ce stade, les éléments concernant les typologies tertiaires ne sont pas décrits dans le décret paru le 3 mars 2022 pour ces bâtiments.
Pour les bâtiments d’habitation, les seuils restent les mêmes que précédemment pour l’étanchéité à l’air de l’enveloppe :
En revanche, le changement majeur réside dans la pénalité qui sera appliquée aux résultats suivant la méthodologie d’essais retenus en fin de chantier :
Les deux dernières « pénalités » sont cumulables, d’où une nécessité plus que jamais de fixer des objectifs atteignables dès la phase conception des projets, et de les garantir à travers une mise en œuvre maîtrisée.
Concernant l’étanchéité à l’air des réseaux, pas de changement, elle doit être mesurée seulement dans le cas où elle est contrainte à une valeur autre que « par défaut » dans l’étude thermique.
SOURCES
Compte tenu de l’urgence climatique et pour donner suite aux Accords de Paris, la France s’est dotée d’une feuille de route stratégique pour réduire ses émissions de gaz à effets de serre : la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC). Analyses et implications pour le secteur du bâtiment de ce document central de l’économie française.
La stratégie Nationale Bas carbone: le référentiel français pour réduire les émissions de GES
Depuis 2015, la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) est la feuille de route nationale à destination des citoyens, collectivités et entreprises pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Co-élaborée avec les ministères et en concertation avec les parties prenantes (entreprises, ONG, syndicats, représentants de consommateurs, parlementaires, collectivités territoriales), son ambition a été réhaussée en 2019 avec comme objectif l’atteinte de la neutralité carbone dès 2050.
La neutralité carbone consiste en un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre. Cette notion n'a de sens qu'au niveau planétaire, la discrétisation au niveau étatique permet simplement une coordination des efforts à l'échelle internationale. Pour la France, cela correspond à la division par 6 des émissions de GES par rapport au niveau de 1990.
Le scénario prospectif dessiné par la SNBC doit définir un chemin crédible de la transition vers cet objectif de neutralité, permettant d’identifier les verrous technologiques et d’anticiper les besoins en innovation, sans s’appuyer sur des paris technologiques.
Concrètement, la SNBC définit des budgets carbone, c’est-à-dire des plafonds d’émissions à ne pas dépasser par période de 5 ans. Ceux-ci sont répartis, selon les possibilités de décarbonation, entre chaque secteur : Transports, Agriculture, Forêt et sols, Production d’énergie, Industrie, Déchets et enfin le Bâtiment. Ces budgets sont actuellement définis jusqu’en 2033, le prochain cycle d’évaluation des émissions et de révision des budgets aura lieu en 2025, puis tous les 5 ans.
Figure 1 : Evolutions des émissions et des puits de GES sur le territoire français entre 1990 et 2050 (en MtCO2eq) – Source : Ministère de la Transition écologique
Le secteur du bâtiment résidentiel-tertiaire est le plus gros consommateur d’énergie et pèse 19% des émissions de GES nationales, soit le deuxième secteur le plus émissif après l’industrie. La SNBC définit un budget carbone global en absolu pour le secteur, dont les objectifs sont :
Ces objectifs correspondent à une diminution annuelle de l’ordre de 9%.
Figure 2 : Trajectoire de réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre du secteur du bâtiment selon la SNBC – Source : Vizea, 2021
L’évaluation de la première période (2015-2018) de la SNBC montre un dépassement du budget carbone d’environ 11%. Outre ce retard important, le rythme de réduction des émissions demeure plus de deux fois inférieur à l’objectif.
Pour massifier la baisse des émissions, la SNBC joue sur tous les leviers du secteur du bâtiment : construction, rénovation et exploitation. Néanmoins le partage des efforts entre ces activités n’est pas défini. De la même manière, les seuils carbone en kgéqCO2/m² ne sont pas explicités.
Pour les acteurs du bâtiment, la feuille de route de décarbonation pourrait être donnée par la RE2020. En construction neuve, la règlementation environnementale RE2020 remplace la réglementation thermique RT2012. Introduite par la Loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) de 2015, elle est entrée en vigueur au 1er janvier 2022 après deux reports. Son objectif principal est de continuer l’amélioration de la performance énergétique et du confort des constructions, tout en diminuant leur impact carbone.
Pour ce faire, la RE2020 fixe des exigences carbones progressives et différenciées selon la typologie de bâtiment (individuel ou collectif). Après une première phase de démocratisation des études en analyses en cycle de vie sur les ouvrages, le seuil carbone maximal en logement collectif passera de 740 à partir de 2022 à 490 kgCO2/m² à partir de 2031. L’atteinte de ces objectifs mènera à une réduction de 34% des émissions. Les seuils carbone au-delà de 2031 ne sont pas encore précisés.
Bien que s’inscrivant dans un objectif de neutralité carbone à horizon 2050, la réduction en intensité carbone prévue dans la RE2020 (-34% d’ici à 2031) n’est pas alignée avec l’objectif de la SNBC du secteur (-49%). Le respect strict de la RE2020 n’est par conséquent pas suffisant. Une articulation avec d’autres référentiels semble nécessaire pour respecter l’ambition carbone nationale.
L’amélioration de la performance thermique de l’enveloppe et de l’efficacité du système de chauffage apparait primordiale pour décarboner le secteur. Le chauffage constitue en effet le poste principal des consommations d’énergie des bâtiments, tout en sachant que le secteur utilise 45% de l’énergie consommée en France (électricité comprise).
Comparée aux autres pays européens, le parc immobilier français apparait moins performant énergétiquement, d’après le Haut Conseil pour le Climat. La France progresse au même rythme que la moyenne européenne, mais le nombre de rénovations lourdes restent loin de l’objectif de 500 000 logements par an.
Figure 3 :Consommation énergétique par mètre carré du chauffage des logements transposée au climat moyen dans l'UE – Source : Haut Conseil pour le Climat, 2021
Outre la performance thermique des logements, la décarbonation des vecteurs énergétiques pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire est un levier clef. L’exemple suédois, avec le déploiement à grande échelle des réseaux de chaleur en milieu urbain et péri-urbain associé à une bonne efficacité énergétique des bâtiments et une construction neuve performante, montre qu’il est possible de réduire massivement les émissions GES du secteur du bâtiment.
Malgré les efforts du secteur et la succession de règlementation visant à améliorer la performance carbone des bâtiments, la France tarde à respecter les objectifs qu’elle s’est définis dans la SNBC. Néanmoins les retours d’expériences internationaux poussent à l’optimisme. Il semble maintenant nécessaire de définir des stratégies bas carbone ambitieuses en s’interrogeant sur le « Pourquoi » et le « Comment » on construit, voire repenser sa raison d’être. Au-delà d’un objectif chiffré de décarbonation, c’est l’avenir de la filière du bâtiment qui est à construire.
- https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc
- SNBC, Mars 2020
- Rénover mieux, leçons d’Europe, Haut Conseil pour le Climat
La diminution du nombre d’agriculteurs, l’agrandissement des fermes, la paupérisation des agriculteurs, mais aussi les dérèglements climatiques sont autant de menaces qui pèsent aujourd’hui sur le secteur agricole. Accroître la résilience alimentaire des territoires nécessite une diversification et une relocalisation des filières pour produire, transformer, distribuer et commercialiser les productions alimentaires.
Occupant près des deux tiers du territoire national, l’agriculture représente un enjeu clés de la transition écologique. Le secteur est le deuxième poste d’émissions de GES de la France (19 % du total national et 85 MtCO2 eq. émises en 2019)¹ L’épandage de pesticides et d’engrais azotés génère également des polluants atmosphériques qui dégradent grandement la qualité de l’air et nuisent à la biodiversité en réduisant les populations d’insectes, de rongeurs ou d’oiseaux. En seulement quinze ans : un tiers des oiseaux des campagnes françaises a disparu. La crise sanitaire de 2020, et plus récemment le conflit qui se déroule en Ukraine ont montré la vulnérabilité de notre système alimentaire en cas d’événements soudains. La diminution du nombre d’agriculteurs, l’agrandissement des fermes, la paupérisation des agriculteurs, mais aussi les dérèglements climatiques sont autant de menaces qui pèsent aujourd’hui sur le secteur agricole. Accroître la résilience alimentaire des territoires nécessite une diversification et une relocalisation des filières pour produire, transformer, distribuer et commercialiser les productions alimentaires.
La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 (art. 39) a instauré les Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) qui ont pour objectif de fédérer les acteurs de la filière agroalimentaire d’un territoire dans une démarche visant à y développer une agriculture durable et une alimentation de qualité, accessible à tous. Ils entendent avoir un impact sur le fonctionnement du système alimentaire dans le territoire, en rapprochant les producteurs, les transformateurs, les distributeurs et les consommateurs pour reterritorialiser l’alimentation. Cette démarche permet aux collectivités de s’engager dans une approche transversale et systémique à la croisée des enjeux de santé, de précarité, d’emploi local, d’aménagement, de biodiversité, de lutte contre le changement climatique ou encore d’éducation...
La crise sanitaire récente « Covid-19 » a mis en exergue le manque de résilience de nos systèmes alimentaires fort dépendants de la disponibilité des produits, de la main d’œuvre et de notre capacité à nous déplacer. Selon le rapport d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires2, un produit parcourt en moyenne 3000 km avant d’arriver dans notre assiette, soit 25 % de plus qu’en 1980. Notre système alimentaire est donc largement dépendant d’énergies fossiles dont le prix devrait encore augmenter dans les années à venir fragilisant les exploitations.
Le secteur agricole est à l’origine de 19% des émissions de GES de la France. Ces émissions s’expliquent par les rejets agricoles de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O) issus des engrais azotés, mais aussi par les changements d’usage des terres et la déforestation, qui rejettent le dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère. La Stratégie nationale bas carbone (SNBC), adoptée en 2015 projette une division par deux des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole d’ici à 2050. Le développement de pratiques agroécologiques peut participer à cet objectif en limitant le recours aux intrants chimiques et en favorisant le développement de la biodiversité nécessaire à la croissance des plantes. Un sol plus riche en espèces végétales est plus résilient face aux intempéries car l’abondance des racines et des micro-organismes qui les entourent permet de maintenir la terre et les nutriments et de stocker du carbone.
Recréer des paysages nourriciers implique également de renforcer les capacités productives des territoires en préservant le foncier agricole dont la surface décline depuis plusieurs décennies. En cinquante ans, la surface agricole utile a ainsi diminué de 10,2%. En 2021, 33.600 hectares de terres ont ainsi été vendus pour être urbanisés. Selon l’atlas sur le prix des terres de 2021, publié par la Fédération nationale des SAFER3, il s’agit du plus haut niveau depuis dix ans. La principale cause de ce déclin est l'artificialisation des sols, c’est-à-dire la transformation d’espaces naturels ou agricoles en espaces artificialisés (routes, logements, zones commerciales). Au-delà de la question des terres subsiste la question de leur transmission. Selon la mutualité sociale agricole (MSA), la moitié des exploitants agricoles va partir à la retraite dans les 10 prochaines années et beaucoup n’ont pas de repreneurs identifiés pour les exploitations. Ce contexte pose à la fois des questions stratégiques quant à l’organisation de l’économie agricole de demain, mais ouvre également de grandes opportunités pour le territoire de réinventer son modèle agricole, en lien avec la transition écologique.
Une transformation profonde du système alimentaire est nécessaire pour réduire sa dépendance aux énergies fossiles, limiter le recours aux intrants chimiques et aux pesticides et améliorer la qualité de vie et les revenus des agriculteurs. Les Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) peuvent participer à ces évolutions en rapprochant les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivités territoriales et les consommateurs. Ils sont coconstruits avec tous les acteurs de l’alimentation dans l’objectif de promouvoir une agriculture durable et une alimentation de qualité.
Les PAT impliquent la conduite de diagnostics territoriaux qui évaluent la production agricole locale, les besoins alimentaires et identifient les atouts et les contraintes socio-économiques et environnementales du territoire. Au vu de ces besoins, sont ensuite élaborés une stratégie et un plan d’actions visant à renforcer l’approvisionnement local, préserver le foncier agricole et faciliter l’installation d’agriculteurs sur le territoire. Cette approche par le système alimentaire territorial dans son ensemble implique une concertation entre des acteurs variés aux enjeux parfois divergents pour définir une stratégie partagée et des actions partenariales capables de promouvoir une agriculture locale durable (respectueuse de l’environnement, rémunératrice, créatrice d’emplois…). Elle est essentielle pour accompagner une dynamique territoriale et connaitre les difficultés et les leviers d’actions pour la relocalisation de l’alimentation.
Le Projet alimentaire territorial représente ainsi un véritable projet de territoire qui permet de re-questionner la cohérence et l’articulation des différentes politiques publiques portées par la collectivité et ses partenaires en matière d’agriculture et d’alimentation, mais aussi de développement local, d’éducation, de santé, d’emploi et d’aménagement. Il implique une approche intégrée qui mobilise des thématiques variées et transversales :
Le renouvellement de la population agricole, la préservation du foncier, la diversité des cultures et le déploiement de pratiques agroécologiques forment aujourd’hui les conditions nécessaires au développement d’un système agricole résilient, capable de nourrir la population et de faire face aux crises et aux vulnérabilités climatiques. Les projets alimentaires territoriaux peuvent ainsi favoriser la souveraineté alimentaire des territoires en permettant le déploiement de pratiques agroécologiques préservant la biodiversité et limitant l’impact sur le changement climatique.
SOURCES
- Rapport sur l’état de l’environnement Le site - notre-environnement.gouv.fr
… évoluer dans un cadre de travail confortable et accueillant, pour nous mais aussi pour les autres espèces !
A l’occasion de la journée mondiale de la biodiversité de ce dimanche 22 mai, nous avons le plaisir de vous présenter le jardin de nos locaux à Malakoff (92).
Auparavant, ce petit bout de verdure faisait partie d’un ancien bâtiment d’activités, que l’agence francilienne de Vizea a décidé de rénover à son emménagement dans les lieux en 2018. Le bâtiment occupait à l’origine la quasi-totalité de l’emprise de la parcelle.
La création d’un jardin intérieur était pour Vizea une évidence. Le parti pris était de créer un espace convivial pour les salariés et en accord avec les principes de résilience et de durabilité de l’entreprise.
Cette démarche a nécessité de déconstruire l’imposante dalle béton pour retrouver la pleine terre, de « dé-tasser » la terre, de remettre de la terre végétale et même de confier à quelques vers de terre le soin de poursuivre le travail de re-naturation du sol.
Aujourd’hui, le jardin est un lieu de vie important pour les Vizéen.n.es.La pelouse d’agrément accueille de joyeux déjeuners, des temps de pause apaisés et les rires et discussions animées de salariés heureux de se retrouver lors des rassemblements inter-agences.
En cette journée mondiale de la biodiversité, nous mettons également à l’honneur notre engagement quotidien envers les espèces faunistiques et floristiques qui peuplent nos villes.
Quatre ans après leur arrivée dans ces locaux, les Vizéen.n.s ont vu la nature petit à petit reprendre ses droits : la terre est redevenue « fertile », les massifs (essentiellement des plantes comestibles ou médicinales) ont pris leur place, le poirier d’ornement accueille quelques oiseaux. La belle glycine, de son côté, commence à faire son office de « casquette » solaire limitant les surchauffes dans le bâtiment et apporte déjà un peu de fraicheur l’été.
Enfin, un hôtel à insectes héberge volatiles pollinisateurs, auxiliaires et autres arachnides de passage dans le jardin. Cet ensemble crée un mini écosystème aussi accueillant pour les humains que pour la flore locale et la micro-faune urbaine.
La création de ce jardin a permis d’augmenter significativement la part de biodiversité et de limiter le coefficient d’emprise au sol à 72%. La terre, initialement de trop mauvaise qualité pour véritablement drainer les eaux de pluies, est redevenue perméable tandis que l’eau qui tombe sur la toiture est totalement récupérée dans notre cuve de 6 m3 qui nous permet, la plupart du temps, d’être autonome tant pour nos sanitaires que pour les arrosages ponctuels.
Rappelons que l’érosion de la biodiversité est une des conséquences du changement climatique et un phénomène de grande ampleur.
Mobilisons-nous maintenant pour préserver les espèces qui nous entourent.
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