Construction – Ségolène Royal supprime les mesures de qualité de l'air dans les établissements de petite enfance

Ségolène Royal a annoncé le 24 septembre dernier le report de l’obligation de mesurer la qualité de l’air intérieur dans les crèches à 2018, et son remplacement par un « Guide de bonnes pratiques ». Certes, le décret concerné avait reçu en 2013 le 2ème prix de la norme la plus absurde. Fallait-il pour autant tuer dans l’œuf cette 1ère tentative de prise en compte de la qualité de l’air intérieur dans les établissements sensibles tels que les crèches ?

Historique de la réglementation remise en cause :

Le contenu du décret polémique

Le décret imposait l’obligation d’évaluer les dispositifs d'aération et de surveiller, via une campagne de mesures, trois substances prioritaires (formaldéhyde, benzène, CO2) tous les sept ans. Les substances visées sont deux polluants (formaldéhyde et benzène) et un indicateur de confinement (dioxyde de carbone).

Une loi « absurde » et chère selon les retours d’expérience

Le rapport Lambert-Boulard sur l’inflation normative du 26 mars 2013 avait décerné à ces décrets la deuxième place sur le Podium des normes absurdes. La raison de ce classement : parmi les missions confiées à l’organisme certifié figurent les évaluations suivantes :

Lors d'une expérimentation pilote menée dans près de 300 écoles et crèches entre 2009 et 2011, les coûts moyens par établissement avaient été évalués à 3.500 €. Aucune aide particulière n’étant prévue pour soutenir les communes, celles-ci voyaient forcement d’un mauvais œil l’obligation de payer un organisme accrédité pour que ce dernier vérifie la présence de fenêtres dans la crèche…

Suzanne Déoux, présidente de l’association Bâtiment santé Plus et spécialiste reconnue de la qualité de l’air dans les bâtiments, avait reconnue elle-même la semaine précédente que le décret n’était pas parfait  « Le terrain a été mal préparé. Les élus locaux ont mal pris le fait qu'on leur impose pour un certain coût – 3 000 euros en moyenne – le recours à une structure certifiée juste pour vérifier dans les écoles si les fenêtres s'ouvrent et sans même avoir à effectuer des mesures. »

Un décret pour autant à jeter ?

Dans ce contexte assez tendu, le ministère de l’Ecologie a ainsi publié un communiqué de presse laconique : « L’obligation, prévue en janvier 2015, de mesurer la qualité de l’air dans les crèches est repoussée, et remplacée par un guide de bonnes pratiques ».

Pour autant, s’il est certain que l’obligation de faire appel à un organisme certifié pour vérifier la présence de fenêtres dans des crèches est peu défendable alors même que la maitrise de la dépense publique est au cœur des débats aujourd’hui, doit-on pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain ? La question du confinement n’était qu’un des aspects abordés par le décret. Que reste-t-il pour vérifier les teneurs en polluants que sont le benzène et le formaldéhyde ? Lors de la 2ème phase de la campagne francilienne « test » effectuée en 2010-2011 dans 7 établissements :

Si la volonté de simplifier la batterie normative devrait être saluée, il est dommageable que la première volonté de prendre au sérieux la qualité de l’air intérieur dans les établissements sensibles soit ainsi tuée dans l’œuf.

Lors des questions orales au gouvernement en juillet dernier au Sénat, le gouvernement avait indiqué quelques pistes à l’étude : faire effectuer l'évaluation des systèmes d'aération par les services techniques des collectivités, mettre à disposition des collectivités des kits pour qu'elles procèdent par elles-mêmes aux prélèvements de polluants, etc. Pourquoi ne pas mettre en place dès aujourd’hui de telles mesures, plus contraignantes qu’un simple « guide des bonnes pratiques » qui ne sera pas lu dans l’immense majorité des cas ?

Peut-être est-il également temps d’ouvrir le débat sur les débits de renouvellement d’air réglementaires dans les établissements d’enseignement. Rappelons qu’ils sont de 15 m3/h.pers dans les écoles maternelles et primaires, contre 25 m3/h.pers dans les locaux tertiaires d’après le code du travail. Nombre de professionnels s’accordent à dire qu’un débit de 30 m3/h.pers est le minimum acceptable pour des enfants afin de favoriser les conditions d’apprentissage…

Retrouvez ici le communiqué de presse du ministère de l’écologie

Retrouvez ici le guide de bonnes pratiques Ecol'air : Développé en 2011 par l'Ademe, ce kit à destination des collectivités locales et aux responsables d'établissements scolaires et de crèches comprend un guide de diagnostic simplifié des installations de ventilation, un guide d'achat et d'utilisation des produits d'entretien, un cahier de recommandation pour la prise en compte de la qualité de l'air intérieur dans les opérations de construction et de réhabilitation des écoles et des outils de sensibilisation

Retrouvez ici le rapport de la mission de lutte contre l’inflation normative

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